Les étudiants mettent la main à la pâte : 4 actions solidaires du monde universitaire
Visières par impression 3D et hackaton : durant la crise sanitaire, étudiants et universités du monde entier se mobilisent au service de la société.

Avec la fermeture des universités, les cours investissent l’espace numérique. À travers différents projets, les étudiants et les établissements supérieurs se mobilisent pour soutenir ceux qui en ont le plus besoin pendant la crise sanitaire, avec ces deux objectifs : produire des visières de protection grâce à l’impression 3D et développer des applications pour suivre l’évolution de la maladie.
1. Université technique de Dresde : l’impression 3D en renfort
Ces dernières semaines ont vu les ministères de la Santé fournir des équipements de protection à ceux qui en manquaient et en avaient un besoin urgent. Médecins, personnel hospitalier et secouristes étant au contact direct de personnes infectées sont d’autant plus exposés au risque de contamination. Afin de pallier cette pénurie d’équipements de protection, se sont associées l’École polytechnique royale de Dresde (TUD), l’alliance d’instituts de recherche DRESDEN-Concept, et biosaxony, l’association pour la biotechnologie et la technique médicale. L’équipe de projet et de recherche a déjà livré plus de 3 000 visières en plastique à des cliniques, mais aussi à des casernes de pompiers et des cabinets médicaux. Ces visières ont été fabriquées par impression 3D et moulage par injection.
En travaillant plus longtemps en journée et souvent de nuit, les scientifiques ont pu réagir à la demande en un temps record. Pour cela, les instituts associés au projet se sont servis de documents de CAO nécessaires aux étapes de production pour l’impression 3D et mis à disposition par la plateforme open source 3D Printing Media Network. Les doctorants et le personnel de la clinique universitaire, de l’Université technique de Dresde et de biosaxony e. V. effectuent ensuite un contrôle qualité, désinfectent le matériel et le préparent en vue de sa distribution.
Michael Klahre, porte-parole des pompiers de Dresde, apprécie cette aide : « Les visières fournies sont un élément essentiel dans le quotidien des services de secours. Elles protègent efficacement d’éventuelles infections, surtout lors de l’intubation préclinique des patients en détresse respiratoire, de l’aspiration des sécrétions, mais aussi des prélèvements dans le nez, la bouche et la gorge. »
2. Université de Warwick : des visières de protection
En Angleterre, Elizabeth Bishop fait un travail similaire à celui du collectif de chercheurs de Dresde. Doctorante à l’Université de Warwick, elle est spécialisée en fabrication additive. Au sein d’une équipe d’étudiants en ingénierie, elle a recours à l’impression 3D grand format par dépôt de matière fondue (« FDM » pour Fused Deposition Modeling) pour produire des éléments de visières de protection que l’institut fournit ensuite au NHS, le système de santé britannique. Les serre-têtes et les armatures s’impriment en moins de quatre minutes.
Elizabeth Bishop a utilisé la conception paramétrique pour réaliser les visières à l’aide du logiciel Fusion 360 d’Autodesk, afin que le projet s’adapte à toutes les buses d’imprimante. Elle souligne toutefois que ses visières ne portent pas la norme CE. « Elles sont plutôt conçues comme protection secondaire, additionnelle, ou d’urgence en l’absence de protection certifiée », précise-t-elle.
3. Université de Stanford : un concours de design
L’Université de Stanford (Californie) a renoncé à la production pour se concentrer davantage sur la conception de masques de protection avec l’organisation d’un concours ouvert aux étudiants du monde entier. Le modèle ? Les fameux masques de plongée Decathlon qui ont inspiré plusieurs entreprises au cours des dernières semaines, comme la start-up italienne Isinnova qui avait transformé le masque de plongée en respirateur.
Un groupe de travail de Stanford, en coopération avec l’Autodesk Ambassador Hub, recueille donc des idées pour trouver comment ce type de masque, une fois modifié, pourrait être utilisé par le personnel médical – voire pour les penser en vue d’une éventuelle nouvelle pandémie. Les masques de plongée classiques serrent la tête et collent de façon étanche au visage. Portés plusieurs heures, ils sont susceptibles d’entraîner maux de tête et manque d’oxygène. Le nouveau modèle doit donc être confortable et réutilisable tout en respectant les critères des masques respiratoires N95 et FFP2. Les masques n’ont certes pas besoin de tuba, mais ils doivent posséder un filtre afin d’intercepter les gouttelettes qui peuvent transmettre des virus comme le SARS-CoV-2.
4. Association des ingénieurs allemands : la prévention à l’aide d’une application
Fin mars, le gouvernement fédéral allemand a organisé un hackathon sous le hashtag #WirvsVirus dans l’objectif de générer diverses solutions numériques pour lutter contre le coronavirus. Chaque développeur qui souhaitait y participer et soumettre une idée pouvait constituer une équipe et concevoir un projet ou programmer le premier prototype d’une application en 48 heures.
Parmi les 28 361 participants au hackathon se trouvaient également quinze étudiants et ingénieurs fraîchement diplômés de l’Association des ingénieurs allemands (VDI). À l’initiative d’Andreas Stutz, ingénieur développement chez Siemens, et de son associé Torben Deppe, collaborateur scientifique à l’Université d’Aix-la-Chapelle (RWTH), une équipe constituée de développeurs de logiciels, d’informaticiens, de scientifiques, d’ingénieurs mécaniques et d’ingénieurs généralistes a mis au point une application baptisée « Deeper ». Cette dernière doit permettre à ses utilisateurs de contrôler l’évolution de l’infection au coronavirus et de savoir s’ils ont fréquenté des zones d’exposition à risque.
Pour Andreas Stutz, le grand nombre d’ingénieurs associés au développement de l’application paraît logique : « Certains d’entre nous abordent le développement de logiciel dans leur métier, et il arrive souvent que nos étudiants développent un logiciel au cours de leurs études. Moi-même, je travaille dans la recherche consacrée aux futures architectures des systèmes de contrôle de processus.»
Cette application est un croisement entre l’application de traçage « Corona-Datenspende », développée par l’Institut Robert Koch, la « CovApp » de l’hôpital berlinois de la Charité qui recense les symptômes de l’utilisateur et lui indique les démarches à suivre, et une autre application de traçage prévue en Allemagne. Étant donnée la multitude d’offres déjà existantes, l’équipe réunie autour d’Andreas Stutz et de Torben Deppe a décidé de mettre son algorithme probabiliste à disposition d’autres développeurs sur une plateforme open source.